Vivre à Paris

Le Paris des écrivains

Paris est un rêve intime, un monde secret, une parenthèse enchantée. D’un côté jaillit la ville réelle, concrète, d’une grisaille hautaine et séculaire ; de l’autre transparaît le Paris rêvé, celui que chacun perçoit, celui qui s’infiltre dans le regard du badaud, du touriste de passage. Celui qui coule dans les veines du citadin. Jamais la littérature parisienne ne fut plus abondante qu’aujourd’hui.

En témoigne le succès des remarquables éditions Parigramme et de mille follicules aux qualités diverses. Comme si chacun – écrivain, poète, plumitif – voulait s’approprier la ville, lui donner un nouvel éclairage. Comme si chacun tentait de définir ce mot équivoque et galvaudé de « parisianisme ».

Aux temps anciens, Jules César a décrit avec une froide curiosité sa conquête de l’arrogante Lutèce ; plus tard, l’apostat Julien en chantera les charmes et la douceur.

Lors, chacun a apporté sa pierre à cette grande cathédrale littéraire que constitue Paris : Villon l’a chanté, Mercier en a dressé l’inventaire, Balzac a décrit ses travers, Hugo l’a boursouflé, Zola l’a radiographié, Leroux l’a endiablé, Aymé l’a enchanté, Fargue et Calet l’ont arpenté, Sue puis Malet l’ont chargé de mystères, Blondin y a bu, Guitry l’a joyeusement peinturluré, jusqu’au sottement décrié Lorànt Deutsch, qui l’a révélé à un public avide d’Histoire et d’histoires.

Le fleuve qui divise la cité en deux rives se gorge de mots et de fantasmes. Paris est comme ce caillou jeté dans une eau claire, dont les cercles concentriques vont croissant, se perdant peu à peu dans le lointain.