Vivre à Paris

A la recherche de la Bièvre…

La Bièvre ? merveilleux fantôme ! Sa mémoire fait encore rêver les parisiens. La simple idée que Paris ait été traversée par une autre rivière que la Seine semble aujourd’hui improbable. Et pourtant… Jusqu’à l’aube du XXe siècle, un cours d’eau prenant sa source à en banlieue sud entrait dans Paris vers la poterne des Peupliers, traversait les actuels 13e et 5e arrondissements, et se jetait dans la Seine au niveau d’Austerlitz.

Il y eut également des dérivations, comme en témoigne une rue qui porte encore son nom, à Maubert. Le mot Bièvre reste en soi un mystère : il proviendrait d’un vieux mot celte, Beber, qui signifie Castor (des castors dans Paris ? jolie idée !) Mais il pourrait aussi vouloir dire brun, car cette eau était très argileuse. C’est même pour cela que la Bièvre était utilisée par les artisans, peaussiers, mégissiers, teinturiers. On lui donnait des valeurs presque magique. La fameuse manufacture des Gobelins se trouvait en bord de Bièvre. Raison pour laquelle la Bièvre est vite devenue une rivière où flottaient mille déchets.

A la fin, la Bièvre n’avait plus rien d’un charmant ruisseau de campagne, enjambée de six ponts et longée de moulins, comme on le voit dans certains tableaux de Carnavalet. Fasciné, l’écrivain Huysmans allait la contempler et la surnommait le  « fumier qui bouge »… Dès le XIXe siècle il fut décidé de la couvrir, pour contenir ses vapeurs méphitiques. Mais combler une rivière implique de reniveler tout le quartier, car il y avait une vraie vallée de la Bièvre. Ainsi le XIIIe arrondissement a-t-il change dé physionomie en quelques dizaines d’années : il fallait parfais augmenter le niveau de 20 mètres ! La jolie cité florale se trouve à l’emplacement d’un marais de la Bièvre ; de même, la Glacière était une zone humide qui gelait pendant l’hiver…

Depuis 1912, la Bièvre se fond aux égouts à Antony, et court sous Paris sur quelques 5 km. Certains espèrent son retour, sa revanche. Mais Paris est une usine à chimères…