Vivre à Paris

Le temps du Carnaval

Présent depuis le Moyen-âge, interdit sous la Révolution mais culminant sous Louis Philippe, le carnaval est un grand moment de l’année parisienne. La ville était une débauche de couleurs, de cris, de sons, de parfums, de saveurs et surtout d’impertinence. On se masque, on se grime, on se bariole ; on s’attaque à la farine, aux œufs, au sable. C’était le jour des fous et tout semblait permis : le lendemain la ville entrait en Carême.

Parmi les nombreux avatars du carnaval parisien, on a gardé mémoire de la célèbre « descente de la Courtille ». La Courtille était une zone campagnarde, de l’autre côté de la barrière de Belleville, où se trouvaient de nombreuses guinguettes et lieux de plaisir. De 1822 à 1860, la nuit du mardi gras au mercredi des cendres, le carnaval parisien s’achevait par une immense parade populaire, qui fédérait tous les petits carnavals de quartier.  On descendait alors de Belleville jusqu’au centre de Paris. Sur le trajet (qui correspondrait aujourd’hui à aller du métro Belleville à la place de l’Hôtel de Ville, en descendant la rue du Faubourg du Temple, la place de la République puis la rue du Temple) les gens bâtissaient des guinguettes de fortune. Les fenêtres donnant sur la parade se louaient à prix d’or, comme pour le Palio siennois ou le grand prix de Monaco!

Autre excès des temps carnavalesque : cette Fête du Bœuf Gras qui semble une vraie réminiscence des cultes mithraïques. Depuis le moyen-âge, les bouchers quittaient les Halles et entraient dans Paris pour se rendre chez les principaux magistrats de la Cité, en exhibant un bœuf couronnée de lauriers. A partir de 1805, le cortège durait jusqu’à trois jours, pénétrant même les Tuileries et tous les bâtiments officiels. L’animal finissait par être tué, et se retrouvait parfois sur la table du chef de l’état !

Il existera également une brève « Vachalcade », anti-procession du Boeuf gras, organisée par les peintres et poètes de Montmartre en 1876 pour dénoncer la vulgarité bourgeoise du bœuf gras. Les chars auront des titres évocateurs qui se rappelaient la Commune : « la liberté sur la barricade », « les lutteurs de la pensée », « le temple du veau d’or »…