Vivre à Paris

Les vraies brasseries parisiennes

La brasserie moderne, au sens de « débit de boisson », est née à la fin du Second Empire. C’était des établissements à mi-chemin entre le cabaret et le bordel, où les serveuses étaient vêtues en harmonie avec la boisson qu’elles servaient (pas forcément de la bière). Cette mode naît sur le Champs de Mars, à l’occasion de l’exposition universelle de 1867, où de nombreuses brasseries «éphémères» se sont établies. Mais comme la Tour Eiffel survivra à son édification, les brasseries costumées, où le service est assuré par des dames dont la tenue illustre la thématique du lieu, vont prendre racine. On en compte même une quarantaine, dans le seul quartier latin, à la Belle Epoque. Leurs noms sont très évocateurs : la Brasserie des Amours, la Brasserie de la Vestale, la Brasserie des Belles Marocaines, la Brasserie des excentriques polonaises, la Brasserie des Apothicaires (de la bière servie par un clystère !) ou encore le Paradis de Mahomet.

L’une des plus célèbres était la Brasserie de l’espérance, rue Champollion, où les brunes servaient des blondes et les blondes des brunes. Il va de soi qu’on alliait l’utile à l’agréable et qu’une partie des serveuses étaient des prostituées.

Dans un même esprit, l’ancien colonel communard Maxime Lisbonne, tout juste revenu de l’île du Diable, fondera La Taverne du Bagne, au 34 boulevard de Clichy. Le client y est accueilli comme un condamné arrivant au bagne ; le personnel est déguisé en forçats ; enfin, pour avoir un « ticket de sortie », il faut évidemment payer sa consommation !

Ces folies fin de siècle ont, comme souvent, fait long feu. Les modes passent, l’esprit s’envole, mais les noms restent, et parfois les lieux. La brasserie tel qu’on l’entend aujourd’hui est un restaurant où l’on peut manger à toute heure des plats roboratifs, tels que choucroute ou petit salé, arrosé de bière.